Autour d‘une gravure retrouvée d’Otto Dix

Le vendredi 11 novembre à 14h30
Salle du Théâtre de Verdure

Otto Dix, peintre et graveur allemand, a combattu durant toute la guerre. L’ensemble des gravures Der Krieg (1924), présenté à l’Historial de la Grande Guerre, traduit la violence et les horreurs du champ de bataille aussi bien qu’en zone occupée. Une 51ème estampe manque à cette œuvre : « Soldat et nonne », écartée de la vente par l’éditeur et donc fort rare. Elle a pu être acquise l’année dernière par le musée avec l’aide du Centre international de Recherche. Elle sera donc présentée et recontextualisée à l’occasion de cet événement.

Intervenants :  Annette Becker, Marie Gispert, Stéphane Audoin-Rouzeau, John Horne.

Verre de l’amitié
Présentation des interventions :

Marie Gispert (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne)

Entre 1920 et 1922, Otto Dix réalise plusieurs œuvres – aquarelles, estampes et même une huile sur toile – représentant violences et meurtres sexuels. Il s’agira ici de comprendre comment ce corpus, qui doit évidemment au traumatisme de la guerre, s’inscrit également dans une actualité contemporaine marquée notamment par l’arrestation puis le suicide de Carl Grossmann et témoigne d’une vision agonistique des rapports entre les sexes chez Dix.

Annette Becker : « Otto Dix en guerre contre les atrocités de la guerre »

Après sa démobilisation, le combattant artiste Otto Dix a participé au happening de la foire internationale dada de 1920 à Berlin où il a montré mutilés et autres rescapés du conflit parmi les détritus de la guerre et de la civilisation, entre dérision, amertume et kitsch. En 1924, les gravures de Der Krieg se recentrent sur la guerre, celle des fronts militaires, celle des fronts d’occupation – la Belgique où il a séjourné – et de leurs atrocités contre les civils.

John Horne : « Viol de nonnes : réalité de guerre ou fantasme sacrilège en 1914-15 ? » 

Autant la réalité des viols de femmes varie selon les guerres, autant leur représentation (quand il y en a) exprime les fantasmes d’une société envahie et humiliée. Tel est le cas, côté allié, en 1914-15. Otto Dix brise un double tabou. Sa gravure est une vision rétrospective, par un vétéran allemand, d’un acte surtout associé (dans la propagande de guerre) aux soldats d’outre-Rhin. Mais dépeindre le viol d’une nonne pousse le symbolisme à l’extrême, car il s’agit d’un sacrilège – comme si on violait la Vierge. Otto Dix puise dans la riche iconographie des guerres religieuses ainsi que dans la représentation des Lustmorde (meurtres sexuels) si répandue dans l’Allemagne de Weimar pour livrer une image si puissante et ambiguë qu’elle est retirée de sa grande série, « Der Krieg » avant sa publication. En serait-elle l’image-clé ?

 Stéphane Audoin-Rouzeau : « Le viol, une arme de guerre »

Le viol de femmes, pendant les guerres contemporaines, a constitué un phénomène massif, rarement envisagé comme constitutif de la guerre elle-même. On regarde souvent ces viols comme une forme de criminalité guerrière plus ou moins inévitable en temps de conflit, mais rarement comme un sujet à étudier comme tel. Or, le viol de guerre nous dit beaucoup sur la manière dont les acteurs militaires envisagent la guerre qu’ils mènent et l’ennemi qu’ils affrontent. La communication, après avoir dressé à grands traits les grandes vagues de viol des conflits contemporains, tentera de proposer une interprétation qui rende compte de la signification profonde du phénomène.

Informations et inscriptions : accueil@historial.org – 03 22 83 14 18